Chronique #519 : More than words

11 avril 2005 0 Permalink 0
your eyes – cook da books
that’s what we stand for
C’est quand même assez dingue cette capacité d’inertie que vous êtes capables de développer des jours et des jours durant. Demain, on verra demain. Plus tard, un autre jour, quand il fera beau, ou qu’on vous distribuera des pommes d’amour gratuitement. Quand vous aurez le courage. Quand vous ne serez plus fatigués, si fatigués de résister et de lutter. C’est comme une fatalité. Vous vous assommez. Vous souffrez. Vous êtes coincés. Mauvais karma, pas de bol. Personne n’y peut rien, et il faut panser les plaies, et il faut gober du supradyne, et, avec un peu de chance, vous y arriverez, à tenir jusqu’à la fin. Aplatis par terre, écrasés par cet enfer là-dedans, et toutes ces voix qui s’engueulent, et la petite fille qui pleure. Vous attendez qu’on vous emmène. Vous attendez qu’on vous cravache de près, vous attendez que ça tombe du ciel. Un jour mon prince viendra, chabada. Un jour la roue va tourner, c’est obligé. C’est comme ça que ça marche. Crescendo. Vous laissez grandir cette rancoeur sans jamais regarder ailleurs. Résignés et dépités. Vous en parlez, vous expliquez, vous dites que ce qu’il vous faudrait, c’est un bon coup de pied au cul, vous revendiquez. Mais vous êtes fatigués, vous n’avez pas le courage, vous avez laissé le combat à d’autres. Vous bricolez. Vous gémissez. Il n’y a plus de révolte, vous encaissez. Vous n’écoutez plus, vous n’entendez plus. Vue brouillée. Obsédés, concentrés à contrôler la douleur. Economie de mouvements. Ça fait tellement mal là-dedans. Un enfer. Corps flottants sur eaux turbulentes. Vous demandez, vous exigez. Please someone call 911. Please someone help.

Tu te souviens. Le giratoire, les issues bouchées. Le désespoir. Ces nuits allongée sur le bitume, est-ce qu’il y a quelqu’un quelque part, et les étoiles filantes. Ces semaines défoncées. Cette envie de crever comme une bulle qui éclate, sans faire de bruit. Disparaître, seulement s’effacer. Tu ne pouvais plus prendre cette responsabilité, tu attendais, ravagée. Tu voulais te laisser couler. Tu t’en foutais de toi et de ta vie, considérablement. Ça t’intéressait plus du tout comme aventure, c’était ça l’idée. Tu t’étais enfermée, qu’on te foute la paix. Il aurait fallu te gommer. Vivante et déjà morte, bon sang mais qu’est-ce qu’on attendait pour balayer ta poussière, à croire qu’on t’avait oubliée encore une fois sur cette terre, et merde, même pas capable de réussir ta sortie… Et puis un jour, il y a eu une terrasse de café. Les souvenirs sont brouillés. C’était une période tellement curieuse. Tellement affreuse. Elle t’a écoutée. Elle t’a invitée. Elle t’a reposée. Elle t’a montré des images. Elle t’a fait réaliser que c’était pas vrai, les stratagèmes et les barreaux des prisons dans lesquelles les gens croient qu’on les enferme. Elle a dépeint les contours de la tienne. Toute cette énergie dépensée dans des combats surranés. Tous ces emmerdements auto-créés. Les ailes des papillons qui déclenchent des tornades. Les luttes inutiles. Les limites à définir, à inventer. Les bases. Adam et Eve. C’est incroyable l’espace que ça a créé. La liberté, la bienveillance. La confiance. L’abdication. T’as abandonné la lutte. Plus envie de subir, plus envie de coquille d’oeuf sur la tête, plus envie de geindre. Merde, ça suffit. C’est vachement plus rigolo d’entrer dans la bataille, vachement plus rigolo de garder ses parts d’ombre bien au chaud, sous la couette, avec ton pyjama. Tu les connais bien maintenant hein. Tu t’en amuserais presque, tellement elles sont prévisibles. Pas de bol les démoniaques, je vous ai repérées. Tu sais où elles essaient de taper. Tu les laisses s’amuser. Interdit d’interdire. Ça les fait pas rire, je te prie de croire. Elles ont perdu leur pouvoir. Crampons glissants. Ça va dévisser sec les filles. RIP. Ou pas. Tu t’en fous maintenant hein. Finalement tu les aimes bien. Tu vois ta vie se dessiner ici et t’affiches un air ravi parfaitement crétin. Tout va tellement bien. C’est pas comme si tu t’inquiétais parce que ça dure jamais ces extases d’habitude, hein. Même pas peur. Tant pis si ça s’arrête demain. Tu capitalises. T’emmagasines. Pour te souvenir. Tu te dis que c’est féérique. Tu te dis qu’elle t’a tendu la main et que tu as attrapé la sienne. Libre-échange. Espace-libre. Et tout à inventer dedans. Et ça te plaît, et ça t’enchante, et ça te pose là, sur le sol, jambes tendues et regard droit devant. Comme l’impression d’avoir été révélée. Elle t’a révélée. Il était temps.

Tu discernes plus bien ta responsabilité, évidemment. Les bonnes nouvelles s’enchaînent plus vite que tes sales manies d’avant. Joy-perfusion. Right here, right now. Tu réalises lentement. Ton rôle, ta pièce à jouer. C’est moi qui l’ait fait. Terminé l’inertie bordel. C’est vachement mieux quand tu tiens les rênes. For the first time of your life. A la vie, à la mort.

Ouais c’est ça, pile ça.

A la vie, à la mort.

ça commence dans la musique, avec un M, héhé.

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