«
La représentation retourne à l’image sensorielle d’où elle est sortie un jour». Tu lis cette phrase de Freud et tu repenses au rêve du CE2, the famous one. ELLE te manque. C’est bien qu’elle rentre mardi, t’as deux ou trois trucs à lui dire. On dirait que tu vas lui poser des questions pour une fois, toi qui ne l’as jamais fait, toi qui la laisses à peine parler d’habitude (
hey c’est normal hein, t’as tout lu freud et des tas de témoignages, alors tu le sais, évidemment, que c’est pas dans les habitudes des psyK de beaucoup parler, voyons, qui va aller imaginer que c’est parce que ça t’arrange de contrôler le système ma grande, mais que les gens ont l’esprit mal tourné, n’est-ce pas… no megalo, no problemo ™, sigh). On dirait que là t’es un peu exaspérée par le nouveau symptôme. Faut dire que c’est pas tellement agréable, évidemment, toutes ces journées passées avec des morts du futur. Tu réalises l’immense vacuité de l’espèce humaine. Waow, y a du progrès on dirait. Ouaip. A part ça c’est fatigant la panique permanente. Le fil du rasoir (
sic), l’instant b qui succède à l’instant a et c’est comme ça, un coup t’es là, un coup t’es plus là, et tu vas vieillir, et toi aussi t’auras mal au dos, et puis des rides, toi aussi tu vas glisser, eux ils vont partir, et il y a le hasard aussi, le coup de tonnerre, l’accident imparable, la cicatrice. Vachement gai chez toi en ce moment. C’est vachement pas drôle de plus être une enfant. Résistance. T’as pas envie de t’écouter, tu disais. Tu m’étonnes. Tu mets de l’air dans ta vie, tu échappes aux miroirs. T’as même plus envie de fumer, c’est impressionnant cette volonté dont tu n’as pas conscience. Comme si tu contrôlais quoi que ce soit. Elle est balèze, la gardienne des clés. Elle a bourlingué. Va pas croire qu’elle va te laisser ouvrir les portes en grand sans venir s’en mêler. Putain de trouille, putain de vague malaise. Tu danses. Léon est parti là-bas où tu n’arrives plus à aller et il y a des gens qui sonnent, il y a ton frère et c’est tellement bien, la vie, en ce moment… Tu files sur les routes avec stevie wonder, tu regardes tout d’un nouvel air, tu dis c’est parti, let’s get happy… Mais il y a ce truc que tu enfermes pour qu’il se la boucle et tu sens sa rancoeur, il sait que tu ne l’aimes pas, il sait que tu as honte de lui, que c’est un truc pas du tout joli… Il veut sortir et toi tu as envie de le regarder en face mais t’es pas prête et t’as peur et tu sens que c’est tout près, ça frôle, et tu as peur, tu as peur, tu as peur. Peur de lâcher et de voir ce qu’il y a, après. Si tu peux t’en remettre d’affronter ça. Si encore tu savais ce que c’était, ce truc dont on parle. No fuckin’ idea. Tu vois juste les reflets dans tes yeux. L’impact que ça a sur toi. Cette terreur et cette envie de crever plutôt que regarder. Pourquoi. Qu’est-ce que t’as, toi. Découvrir que rien, que tout est vain. Redescendre. Nettoyer jusqu’à évaporation. T’as envie de retenir le temps. T’as peur qu’ils meurent, tout le temps. Ta famille. N’importe qui, n’importe quand. Tu gueules devant les images du pape agonisant, tu t’offusques du feuilleton télé-réalité from monaco-les-bains. Bien fait. Faut pas regarder TF1. Tu vois des gens. Tu voudrais être entourée de gens. Tourbilloner, te laisser déborder. En vacances par exemple. Fuir et te laisser ailleurs par la même occasion. Embarquer l’insouciante. Tu voudrais que ça s’arrête.
Rapidement.
C’est fatigant de tout le temps contrôler ta pensée. La retenir loin des sentiers sur lesquels tu refuses catégoriquement de t’engager. Vade retro projections. Bordel ça va faire du bien qu’ELLE rentre. Histoire de remettre en marche le caisson à oxygène. T’es pas bien préparée pour parcourir toute cette distance à la nage, toute seule, sans aide et sans escale. Des kilos à décharger. T’as hâte. En fait ça te gonfle, parce qu’à part ça y a tout qui va. Les bons trucs dans les bonnes cases et le sourire aux lèvres. Et tu sais pas très bien les mesures de la profondeur de l’iceberg. Alors putain ça te fait chier cette manie de tout le temps penser au pire qui puisse arriver comme terrible événement dans ta vie. Le genre d’événement qui ne devrait jamais arriver dans la vie d’un enfant. Voilà où tu en es. Piquet de grève. Inner child never gets old ’cause inner-adult doesn’t exist. Ou à peu près. Tu fuis et tu te fuis et tu te dis que ça peut plus durer tellement longtemps ces conneries.
Voilà. Tu écris des tartines et tu noies le poisson, quelle organisation ma vieille, c’est stupéfiant. Ah ah. T’es au bord de l’épuisement et tu sens que ça va lâcher dans pas longtemps.
T’espères juste que ça va pas être trop violent.
we live at the funky house… great week-end ! (jolie séance de feng-shui, je dessine ma nouvelle vie)
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