Chronique #169 : Joyeux anniversaire

08 juillet 2004 0 Permalink 0
Evidemment, je suis nostalgique de mes anniversaires d’enfant. C’est mon anniversaire – le jour que je préfère – et je soufflerai bientôt – les bougies de mon gâteau.
mes voeux les plus sincères.
A vrai dire, je ne sais même plus. Je me suis inventé tellement de souvenirs d’enfance… Comment savoir, aujourd’hui ? Et surtout comment retranscrire tous ces sentiments par écrit, comment dire ma tristesse devant l’abscence de magie des anniversaires dont je me souviens ? Mon entêtement à réclamer, exiger, choisir mes cadeaux… puis à être déçue de ne pas déballer autre chose, de ne pas être surprise. Depuis toujours, à sept ou huit ans déjà… Mon aversion aujourd’hui pour les cadeaux forcés, téléphonés, imposés. Mon émotion et ma joie quand j’ai trouvé LE cadeau parfait, ma capacité à déménager des montagnes, à faire des kilomètres juste pour avoir le bonheur de l’offrir, les larmes qui me coupent le souffle quand il étonne enchante ou émerveille…

Avec Loustic, c’est facile, trop facile, j’abuse. Je joue avec son désir, que je comble à chaque fois, quand il s’y attend le moins. Je me freine, je m’impose des règles, sans bien comprendre pourquoi, sans adhérer vraiment à cette loi tacite qui intime la confrontation à la frustration, au prétexte que «dans la vie on ne peut pas tout avoir»… Je me dis que je contribue à lui construire une enfance magique, dans laquelle il pourra puiser la force d’être un adulte heureux, rayonnant… Je me dis aussi que c’est peine perdue, qu’il va se coltiner des névroses à cause de moi, descendantes des miennes… Curieusement l’un ne compense pas l’autre. Tout ça vit en parallèlle, selon le sens du vent, selon la phase de mon instabilité émotionnelle chronique… Il y a l’image, la projection de ce que j’aurais aimé vivre quand j’étais enfant. Il y a ma culpabilité, ma honte. Il y a l’histoire particulière que j’ai tracé avec lui, tellement désiré mais tellement oublié derrière l’écran noir de ma souffrance… Il y a la peur irraisonnée de le perdre, superstition écrasante, vengeance de la vie, prix à payer… J’ai peur de la vie.

J’ai un net souvenir du jour où j’ai perdu mon innocence, où la magie a disparu de ma vie. Finie l’époque où les petites souris collectionnent les dents de lait, où les cloches reviennent de Rome chargées de chocolat, fini le rêve. En tous cas, c’est le sentiment qui m’avait traversé l’esprit ce jour là. La première fois où j’ai vu, concrètement, mes oncles et mes tantes transporter les cadeaux jusqu’au pied du sapin. Mon intense mélancolie, ma tristesse exacerbée. Et la bonne surprise, aussi, devant les poupées et leurs vêtements qu’avaient préparés ma mère pour ses filles dans le secret de sa chambre à la maternité, pour accompagner la naissance de notre dernier frère.

J’entrevois aujourd’hui toutes les connexions, les strates, les erreurs de parcours. J’entrevois surtout ma quête du désir, je focalise là dessus. Constamment, je suis en quête. Constamment, j’ai été en quête. J’ai pleuré, quémandé, somatisé… En vain. Je suis effarée par l’étendue de la tâche.

Je m’aperçois que j’ai lutté contre les associations libres ce soir. J’ai recadré, suivi la trame. Ce fameux Noël, j’avais décidé de l’écrire dans le marbre. J’étais partie ailleurs pourtant… résistance… Départ demain, trois jours à la campagne. Retour au papier et à mon précieux carnet. Si besoin. Je vais essayer de ne pas trop préparer cette dernière séance, lundi, avant ses vacances.

RAS au bureau, enfin faut que j’arrête de trop parler quand même, je suis entrain de mettre en place tous les ingrédients habituels, ça va mal finir. Faudrait un jour que je supporte de ne pas être instantanément populaire. Anniversaire fêté pour la troisième fois, entre deux valises. Ah, et j’ai découvert que jamais je n’ai eu conscience que Freud a été un personnage au moins aussi éloquent pour Vienne que Elisabeth d’Autriche. Pas conscience du tout de son empreinte sur la ville, jamais effleuré l’esprit. Et pourtant j’y ai vécu un an. Dingue.

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